mercredi 29 juillet 2015

Réhabilitation du Pim's à l'orange

Si vous suivez l’actualité, vous devez savoir que cette semaine est placée sous le signe de la polémique-ados, adultes, vieux, nous sommes tous concernés - polémique disais-je, aussi inextricable qu’internationale. Comme les médias ne comprennent goutte à l’affaire qui déchire le monde et refait surgir les fantômes de sa division en deux blocs, ils ont pour l’heure préféré la taire. La question est pourtant simple : quelle place le Pim’s à l’orange tient-il dans nos bouches et dans nos cœurs ? Insistons sur le fait que le débat ne porte que sur la version orange du biscuit, surtout pas framboise, et encore moins Pomme’s.

Figurez-vous que lundi matin à la première heure, impatiente de donner son avis d’experte sur la question, Daily Cieuse, leader givrée* de la team S’Caille, maillot à point de la meilleure grimpeuse après je ne sais combien d’années de blogging en pente abrupte, lança dans le premier petit col, Hié de Lu, une attaque décisive : elle n’hésitait pas à qualifier le Pim’s à l’orange de « produit vaisselle en gelée » bon à « remplacer une bonde de baignoire », et à traiter ses consommateurs de demeurés. La miss avait si bien tourné son article qu’en un clin d’œil le Pim’s à l’orange dégoûtait la terre entière.

J’avais beau être en vacances, je ne pouvais laisser pareille infamie se tramer à mon nez et à ma barbe si j’en avais. Je me rappelais trop les injustices faites aux Petits Beurres ; pour rien au monde je ne tolèrerais la répétition de telles injures. Mais perdu que j’étais dans la pampa, et sans connectivité, je m’aperçus Dieu merci, assez tôt ! que les conditions dans lesquelles je me trouvais n’étaient pas optimales pour retourner un procès mal embarqué ; j’allai donc acheter une carte Sim’s à Orange, la ville la plus proche ; ce fut une charmante dame, une bonne pâte, génoise en plus, qui me reçut. Je me demande pourquoi je vous raconte tout ça, je voulais juste dire qu’une fois équipé d’un téléphone, je pus dicter à Mister Menupénis, mon secrétaire, cet article, oui celui-ci, et qu’après un certain temps Mister Menupénis me dit que ça faisait déjà trois paragraphes que je lui dictais et que par conséquent, il était judicieux de songer à conclure.

Je lui répondis sèchement que les conclusions, c’était pas du tout mon tuc, que je préférais les apéros. Eh là, devinez quoi ! Mister Menupénis se met à me traiter de tous les noms, il me hurle que mon client le Pim’s à l’orange est pas dans la merde avec un incapable comme moi ! Eh pim ! Ça fait… non pas des Chocapic, mais mal à mon ego, alors je n’hésite pas une seconde : « Tu es viré ! que je lui crie, sur la paille-dehors ! »

De dépit je raccroche, hors de moi je mets un grand coup de dent dans mon client. Quelle erreur ! Mais quel délice ! Le Pim’s n’est-il point le résultat raffiné du savant mélange de trois saveurs et de trois textures ? Ô douce Daily Cieuse, pourquoi s’en prendre à cet être chétif à la fois si craquant et si moelleux ? Tant d’acharnement me dépasse. Je me souviens du temps des récrés où, jeunes, nous sortions nos goûters et où, de peur qu’on me les vole, mon meilleur ami me disait : « T’entends, cache tes Pim’s, allô, range-les dans ton slip ! »

*pour ne pas dire gelée.

mardi 21 juillet 2015

Mais qui est Nigel Richards ?

Le nouveau champion du monde de Scrabble francophone est néo-zélandais, et voilà j’ai enfin casé mon Z ; en effet, vous ne le voyez pas depuis chez vous, mais sur le jeu il y avait déjà « landais » et moi je viens de rajouter « zé », trente, trente-et-un, trente-deux, trente-trois, trente-quatre, trente-cinq, trente-six, trente-sept, trente-huit, trente-neuf, pas mal, d’ailleurs y a qu’à mater la lippe de Mamie pour mesurer son désappointement de voir ainsi mon gros Z sur la lettre compte triple.

« Ça fait 39-8, Mamie. » Voilà qui sonne comme un score de Nouvelle-Zélande-Italie. Au bout de vingt minutes de jeu. Nigel Richards, avec un tel nom et une telle nationalité, aurait pu jouer au rugby, au pire arbitrer ; mais Nigel Richards, qui visiblement ne met ni gel ni rien dans cette be-bar qu’il a plutôt fournie, quitta tôt ses pénates pour aller faire un tour en Malaisie, ce qu’on appelle communément chez nous un tour malais ; bizarrement, les heures de colle du mercredi après-midi ne firent pas les mollets du petit Nigel, au grand dam de ses professeurs qui bientôt décrétèrent n’en pouvoir rien tirer. C’est dans cette période troublée de son existence que le petit All Black tout blanc apprit le Scrabble. Depuis, Nigel douche quiconque ose se frotter à son étoffe de champion.


En 2007, Nigel est champion du monde de Scrabble anglophone. En 2011, rebelote. En 2015 (on remarquera qu’en bon Néo-Zélandais, Nigel ne travaille que tous les quatre ans, en période de coupe du monde de rugby), proche de la retraite il se lance un ultime défi. Celui de devenir champion du monde de Scrabble francophone. Sans parler un seul mot de français.

Sa technique, très simple : deux mois pour apprendre le dico. Easy. Tous les mots de la langue française de deux à dix lettres. C’est ainsi qu’avec le J, Nigel apprit à proposer autre chose que « Jonah » et qu’avec le W il se mit à faire « wu », comme tout le monde, sans plus se souvenir s’il s’agissait là d’un dialecte, d’une monnaie, d’un singe ou d’un légume chinois, comme tout le monde. Wu, c’est trente-et-un points, barre.

Hier Nigel Richards, être singulier au patronyme pluriel, en recevant sa couronne, réussit son pari. Dans son discours de remerciement, traduit de l’anglais par Nelson Monfort, sept lettres, il insista sur le fait que beaucoup de Français parlaient la langue de La Fontaine plutôt mal et auraient fait par conséquent de grands champions. Rien ne sert de parler, il faut compter les points.

mercredi 15 juillet 2015

Lettre à Chris

Cher Chris,

Dans les Pyrénées tu nous as rappelé tes pires ainés. Armstrong, le bras fort, trop fort, si fort qu’il jouait de la trompette sur la Lune. Tu nous as fait penser à Ricardo, t’as le look coco Ricco ! Ou bien encore au danois aux pattes de coq, Rasmussen, qui nous a bien plumés. 
Comme eux, quand Christopher devient Chris trop fort, évidemment émergent des doutes. Alors, avant qu’on ne fasse de toi l’Antéchris en te jugeant trop vite, je prie pour que tu nous offres un cadeau avant la fin de ce Tour que tu domines des pédales et du casque : 

Un peu d’humain, que diable ! 
Une goutte de sueur peut-être, un instant de panique, un vertige, une fringale, pourquoi pas ! Mais sois humain, Chris, montre-nous que sous ce casque il y a une tête fragile qui commande des jambes à son image : friables, imprévisibles, incertaines. 

Que tes attaques du tac au tac soient le fruit d’un entrainement qui en aucun trait ne ment. 
Que ta vélocité soit naturelle, que ta préparation soit nature, elle. 
Les Alpes t’attendent au tournant, que ta trajectoire reste propre, garde ta ligne Chris. 

We believe you can touch the Sky. Mais touche-le proprement. Ce sport qui fait la lessive comme aucun autre, qui lave plus blanc que blanc, a encore besoin d’amour. On ne souhaite que croire en ta propreté, mais aide-nous et ne nous déçois pas.
Nous ne voulons pas de Chris crucifié mais croire en un Froome cru, et s’y fier. 

À bon entendeur,

La Musette


lundi 13 juillet 2015

Lundi 13 juillet : repos, ma foi

En ce jour de pont-repos, vous êtes nombreux à prendre des nouvelles de @DansLaMusette. Vous faites bien. Un tel silence de sa part est suspect. Vous avez raison de croire que le rythme effréné des publications l’épuise. Figurez-vous qu’hier au soir après avoir lu comme chaque soir son billet, j’appelle mon brillant compagnon d’écriture pour le féliciter. Mais j’ai grand mal à le joindre, pourtant il n’est que 21h alors forcément je pense au pire, quand son répondeur joue son petit message : « Salut, je boulotte mes panzani en slop avec Zdenek Slibard. » L’overdose ! L’overdose de braquets et de Titi Adam ! La Musette a perdu la raison ! Je ne vous cache-cache pas que je suis franchement en stress, je ressaie, ressaie, ressaie de l’appeler et voilà qu’il décroche enfin :
« Publiéééé ! me crie-t-il d’une voix à la con.
Je sais que tu as publié, j’adore ! » que je le félicite. « Mais pourquoi ne réponds-tu pas ?
Nan mais là j’déprime, chef, j’étais invité ce soir à une teuf entre cyclistes avec DJ Van Garderen et Nicolas dit Geay aux platines, mais j’peux pas y aller, j’ai trop maaal aux clavicules ! Je sais bien qu’Eric m’enverra des photos, mais merde ! La publication m’exténue ! J’ai les poignets qui craquent ! Et je suis obèse, je ne bouffe plus que des kébabs et je leur dois d’ailleurs pas mal d’argent aux Grecs ! Un sac, que je suis devenu ! P’tin tu sais pas c’que c’est de faire sa loque entre la télé, Twitter et un blog ! »
Voilà qu’il éclate en pleurs.
« Et ma petite muse m’a quittééé ! Je suis largué, lâché, que dis-je lâché, distancééé ! D’ailleurs je la comprends, je n’ai plus de temps pour personne ni pour rien faire, quand j’m’endors j’vois des roues, quand j’me réveille j’vois des roues ! Des p’tites roues, des p’tites roues, des p’tites roues partout ! »
Je ne sus que dire. Je me sentis coupable de l’avoir embringué dans l’aventure des cousins qui piquent. La chose était terrible. Mon ami venait de perdre, et la force des clavicules, et l’aura de sa musette. Ça fait beaucoup pour un seul homme.
« J’arrête ! » qu’il me gueule soudain à l’oreille. Sentence irrévocable. Une larme me vint à l’œil. Mais il reprit :
« J’ai quand même une idée pour l’étape de demain… Tu sais, Tarbes, les ch’Tarbais, tout ça… »

Doux lecteurs, de peur que @DansLaMusette nous quitte, vous avez fait haka dans vos frocs, y a ka maté vos gueules, je vous ai bien eus ! Pour passer plus agréablement ce jour sans vélo, je vous propose un top 10 des meilleurs mots dont vous et moi avons pu nous délecter sur ce blog pendant, Madame, Monsieur, les neuf derniers jours !
10. Tom Dumoulin voit son rêve de maillot blanc et jaune se casser dans l’œuf.
9. La frontière belge est passée, rien à déclarer, sinon notre flamme toujours plus ardente pour la petite reine de nos cœurs.
8. Pas besoin d’être une flèche pour comprendre que le Tour se Wallonne au jour d’Huy.
7. Les freins de Froome crissent et sous les pavés, la page se tourne.
6. Froome, Chris aux p’tits soins dans la lunette des caméras et dans l’œil du cyclone !
5. Durasek, enfin, les accompagne, après avoir bien rechargé les batteries, le Croate tombe pile dans l’échappée.
4. Adam et Dave sont aux commentaires de la genèse de ce cru 2015.
3. Côté étape, la belle était plutôt plate pour des hommes en forme. Son seul piment : de beaux gros pavés.
2. Le Britannique tout le monde sur la ligne !
1. Si les guidons en forme de corne m’usent, ils ne lassent pas le peloton où solides comme des menhirs, les idoles mènent.
Restez connectés, car le meilleur reste à venir !

dimanche 12 juillet 2015

Étape 8 : Vuillermoz et ça marche !

La Bretagne est une terre de vélo, et ce n’est pas volé. 

On y entend le loup, le renard et la bicyclette. Tri martolod ! Tri Yann ! Tricycle ! Biniou ! Ribiniou ! Trop beau Léon ! 

La Bretagne, même si ce n’est pas la grande comme celle de Froome et son peuple de roux, a au moins pour elle la passion d’un peuple pour le deux-roues. 
Si les guidons en forme de corne m’usent, ils ne lassent pas le peloton où solides comme des menhirs, les idoles mènent. Le cortège de jambes a donc continué sa danse traditionnelle, laissant la Normandie à son Mont-Saint-Michel et gardant son cœur de pilote Vaillant, mon sain Michel. 

On connaissait déjà le mur de Huy, belge il était, une fois ! Mais cette fois-ci, direction Mûr-de-Bretagne. Le mur de Mûr-de-Bretagne exactement. Pente raide et explosive au milieu des champs, dans les terres bretonnes, presque inopportune tant elle semble avoir sa place ailleurs qu’ici. 

Le peloton se lance comme un mort de faim vers l’arrivée, laquelle se dresse face aux casques à pointe de vitesse, imposante comme un mort béant avec ses côtes d’art mort. À l’arrivée il n’y a pas photo finishtère ! Cocorico, un gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur : Alexis Vuillermoz gagne en costaud, Astérix et périls ! Au nez et à la barde de Froome et du gratin mondial où, moins à la fête, Nibali est ressorti à plat comme une crêpe, triste cidre. Pas de bolée pour lui.

Alexis le gaulois a fumé tout le peloton. Et c’est les bras levés qu’il se Jura, dans cette franche contrée, qu’on pouvait désormais franchement compter sur lui.


Viser la lune, ça ne lui fait pas peur. Mais toujours le poing levé


vendredi 10 juillet 2015

Étape 7 : Cavendish, comme un fou gère

Au départ de Livarot, Chris n’en a pas fait tout un froomage. On lui a pourtant proposé un petit jaune et il l’a poliment décliné, refusant de porter ce pastis pastiche à sa bouche. Et il rit car on lui reproche d’être hypochris. 
Affûté et affiné tel un bon fromage, comme Wiggins l’amateur de rock fort put l’être avant lui, Froome d’Ambert et contre tous a donc porté à sa façon un toast en l’honneur de Tony Martin. L’absence de jaune sur la route du Tour est donc déclarée, et c’est un Froome aux pattes molles qui laisse le célèbre maillot au Havre, à bon port, salut ! 

Sur la route, il y a Delaplace pour tout le monde. Et Anthony, le local du jour s’est fait plaisir à l’avant du cortège. Le normand nomade, normal, pas morne, ne manque pas de mordant, dis ! Il se fait suivre par un breton, séché après les averses de la veille : Brice Feillu, droit et grand comme un arbre. Teklehaimanot est aussi de l’aventure, décidément, loin de l’Érythrée et de sa dictature, il aime que son diktat dure. Durasek, enfin, les accompagne, après avoir bien rechargé les batteries, le croate tombe pile dans l’échappée. 

Le reste sera morne plaine. Un long jeu de chat et de souris, à toi, à moi, les échappées suent pendant que le peloton pacha sourit. Le longiligne érythréen prend du pois, conserve sa varicelle qu’il ne veut pas contagieuse, et bosse fort comme un détroit turc dans les bosses. Puis la fatalité s’abat : les déserteurs de Gobi sont gobés. 

Aux abords de l’arrivée à Fougère, Cavendish, comme un fou gère. Son sprint est véloce, féroce, et enfin il ne bute plus sur cet os, Greipel le boss et son carrosse. Un an après le traumatisme d’Harrogate, le britannique tout le monde sur la ligne et peut enfin exulter, les poings au ciel en hurlant qu’il est redevenu le Mann de la situation. 


Le britannique Mark des poings

jeudi 9 juillet 2015

Étape 6 : la chute de l'impérial germanique

Abbeville-Le Havre, de la belle ville au havre de paix, le peloton a musardé de musette en musette jusqu’à la fin du bal au bord des docks, où le poids et l’ennui lui ont courbé le dos.
Au départ, trois hommes se partageaient des parts de gloire. Teklehaimanot, érythréen pas éreinté par la tâche loin de ses attaches, l’Afrique noire, sur les routes d’une France noire de monde. Perrig Quémeneur, au péril de sa forme, qui compile les échappées belles, qui bouffe du vent à la pelle. Van Bilsen, délaissé par son leader blessé et lassé au bord de la route, tentant de porter une Cofidis abandonnée, dans un effort solitaire et solidaire en hommage à son général Nacer.

À l’approche des docks, Doc Martin, tout de jaune vêtu dans son solide paddock Etixx, a gardé le cap plein phare, far far away jusqu’à la flamme rouge, où l’Enfer l’a rattrapé : à vouloir jouer des coudes il s’est brisé l’épaule, à trop vouloir briller il s’est brûlé les ailes dans son excès de zèle. Zèle fracturé. Et la facture de la clavicule est corsée. Le maitre du temps ne put être maitre de son tempérament. Quelques petites côtes de porc à passer jusqu’à bon port, et c’était réglé pour le panzer, qui n’avait plus qu’à boulotter ses panzani. Et voilà qu’il broie du jaune, clavicule en écharpe et moral en berne, tristes compagnes l’obligeant à rejoindre Cancellara le bernois au panthéon des jaunes déchus et déçus.

Zdenek Stybar, quant à lui boira son champagne tiède à demi-goutte, son leader étalé sur la route lui laissant comme un nœud à l’œsophage. Le mal au cœur ce soir chez Etixx ne sera pas celui de l’ivresse mais celui de la tristesse, celle de perdre sur la route un roi soleil tombé sur le sol normand.


La garde rapprochée de Martin, entre détresse et liesse

mardi 7 juillet 2015

Étape 4 : Tony par cœur et courage

Partir de Seraing est quelque chose d’osé dans le monde de la chasse à la piqûre. Mais pas de pavé dans la mare, le dopage reste au dos des pages sombres que l’on espère tournées depuis longtemps, en espérant qu’il n’y ait d’opé que des coureurs clairs comme de l’eau de Stephen Roche.

C’est donc gorgé de sérénité que le convoi coloré de la route du Tour s’est élancé vers Cambrai. Côté étape, la belle n’avait pas de cambrure et était plutôt plate pour des hommes en forme. Son seul piment : de beaux gros pavés. 

Le traumatisme des chutes d’hier a peut-être calmé les ardeurs abruptes des hardeurs flahutes, mais les secteurs, d’habitude si sectaires, à un point tel qu’ils sélectionnent soigneusement leurs spécialistes, n’ont réussi à piéger personne. 
Sinon le malheureux Pinot, simple flop. Pour le franc-comtois, c’est encore un franc compte à rebours à débourrer. Dans le fond comme dans la forme, c’est une petite forme qui lui fait toucher le fond. 

La frontière belge est passée, rien à déclarer, sinon notre flamme toujours plus ardente pour la petite reine de nos cœurs. Les coureurs font voler la poussière et dépoussièrent encore un peu plus le passé glorieux de leur sport. L’équilibre instable des vélos nous captive, il flotte au dessus des coureurs une épée de Damoclès en fer du Nord. Quelque chose d’épique navigue dans l’air, un parfum de légende.

Les freins de Froome crissent et sous les pavés, la page se tourne. La victoire offre son V au tonique Martin, enfin récompensé après tant de chances perdues au millimètre pour le méga-maitre du temps. Tony, on le connait Parker, alors frère Jacques, sonnez les Martin ! Le king dingue, donc. 

Le jaune, volage et qui multiplie cette année les conquêtes, les compagnes au fil de ses quêtes et de ses campagnes, aime récompenser les audacieux. Légitimement il vient donc s’installer sur les épaules solides du rouleur l’allemand, qui enfin, ne se sent plus roulé.

Opération coup de poing réussie pour Martin

lundi 6 juillet 2015

Étape 3 : le jour d'Huy et le KO

Pas besoin d’être une flèche pour comprendre que le Tour se Wallonne au jour d’Huy. Depuis l’Anvers du décor, les coureurs ont foncé droit dans le Mur en passant par le parcours de la célèbre classique ardennaise. Un grand Tour qui révise ses classiques, c’est plutôt original comme idée et ce n’est pas une blague belge. Aujourd’hui, il fallait donc avoir la frite dans le cuissard qui moule. 

Devant la monotone échappée matinale, on commençait à songer à s’ennuyer, jusqu’au mur final, tout le contraire d’un Huy clos tant la foule était dense pour sa danse avec les stars. Soudain…

Le chaos. 

William Bonnet percuta la roue d’un Bora pourtant pas en vacances sur l’île éponyme, Argon les amarres, et chute du mur de Berne Cancellara. Entremêlement. Sac de nœuds. Vélos qui volent. Maillot jaune à terre, drapeau jaune au ciel : course neutralisée. Neutralité suisse qui déteint sur l’organisation de la course et de sa direction. Christian, homme prudent, décide de stopper l’hémorragie depuis sa voiture rouge sang. 

Cancellara se relève, qui m’aime me suisse !

Le peloton tergiverse, s’arrête, repart, mais les britanniques secouent le cocotier devant les Bora Bora, they believe they can touch the Sky. La course avance et recule, avance Hercule ! Spartacus est touché mais pas coulé.
Le pauvre Bonnet, équipier exemplaire et bonne poire William voit son chemin s’arrêter au pied du Mur, tout comme Simon Gerrans ou encore Tom Dumoulin, le hollandais volant qui voit son rêve de maillot blanc et jaune se casser dans l’œuf. 

La route du Tour ressemble à un départ en vacances même s'il revient de l’Enfer : bouchons devant et trous à boucher pour les distancés qui échouent, échoient et choient dans les choux. 
Pied à terre, comme devant un passage à niveau qui ne voudrait pas faire passer son train, le peloton stagne dans un train-train pas si quotidien. 
Les plaies sont pansées, on peut repartir, la boule au ventre, l’estomac noué. On n’ose attaquer. 

Mais la course finit par se décanter au pays de l’angelot Manneken Pis, et Angelo Tulik secoue le peloton. Raté, la meute est groupée au pied du mur. Des favoris vont aux fraises et cueillent des mûres de Huy : Pinot notamment est vain. Et Froome se promène. Un peu moins que Mur-ito Rodriguez qui fume le cigare devant, même si Tony galope, hein ! Tentative de cocorico, on découvre aussi avec plaisir la belle place de Vuillermoz, qui se Jura, mais un peu tard qu’on ne l’y reprendrait plus. 
À la fin, comme hier, Tony Martyre échoue encore pour une seconde dans la course au soleil. Et c’est Froome qui jaunit déjà, comme une jonquille un peu trop précoce. 

Demain, le chemin des coureurs sera pavé de gloire, mais risqué. Impossible de souffler, au contraire, il faudra (encore) souffrir. 

William Bonnet, forçat de la route

dimanche 5 juillet 2015

Étape 2 : dur dur d'être une bordure !

Sur le vélo on connait le coup de bambou, le coup de mou, le coup de poing dans Merckx et le coup de moins bien. Il existe aussi le coup de bordure et aujourd’hui on en a bouffé à tous les coups aux Pays-Bas, de ce coup bas à bas coût !

Le coup de bordure, c’est comme croiser ton ex dans la rue : tout le monde y pense, tout le monde le craint et veut l’éviter mais elle finit toujours par arriver. Et quand ça arrive, tu es largué (comme par ton ex, d’ailleurs, mais ça c’est une autre histoire).

Ainsi, on pouvait lire entre les lignes de cette première étape en ligne que son sous-titre serait « ça va bordurer ». Et pour notre plus grand plaisir le chapitre du jour s’est montré à la hauteur de sa couv’ au premier abord, dur. 

Comme son nom l’indique, le but de de cette manœuvre est de foutre tout le monde sur le bas-côté quand souffle un fort vent latéral, afin de laisser des gros poissons dans la pampa, échoués et dans les choux. La pluie est une option intéressante car la bordure mouillée est un terrain encore plus glissant. 
Il suffit donc qu’une équipe d’épouvantails fasse l’éventail, alors le vent taille le peloton en deux, en trois ou en cent-dix-huit morceaux (il faut que des favoris soient piégés, sinon ce n’est pas drôle). Un cas sûr de bonne bordure, c’est une cassure. Et aujourd’hui, à la manière de Rohan de Nice ou de Brice Dennis, le peloton s’est fait casser.

L’île nouvelle de Zélande était le théâtre idéal pour mettre des hommes à la mer et des hommes à l’amende. Bonne nouvelle, Zélande a tenu ses promesses ! Des favoris se sont fait haka dessus, y’avait ka maté leur visage à l’arrivée : sous la pluie, des litres de sales gueules pour Quintana, Nibali, Pinot, Bardet, Kruiswijk, Yates, Peraud… Dure, la bordure, et ça dure ! Il restait cent kilomètres à parcourir quand tout péta en petits tas. 
Seuls quelques favoris parvinrent à tenir et à se friser les moustaches au nez et à la barbe de leurs concurrents directs : 
-Froome, Chris aux p’tits soins dans la lunette des caméras et dans l’œil du cyclone.
-Alberto, qu’on t’adore quand tu sais faire la course devant ! 
-Le TVG Tejay Van Garderen, arrivé à l’heure, OK au quai, malgré la grève des contrôleurs d’échappées. 

Avant l’arrivée, Perrig (quel meneur !), Fonseca (encore Séché avant la pluie), Barta (tchèque it out) et un Stef plutôt clément avaient tenté de se barrer. En vain. 
Pour la victoire d’étape, et Brassens nous avait pourtant prévenu, c’est Greipel qui grappille, le Gorille de Rostock, mastoc, s’impose devant un Caven-desh’ livré à lui-même dans le final. Sagan, sans en faire un roman de Françoise, attrape la 2ème place. Cancellara, quant à lui se pare de jaune en terminant 3ème. Les bonifications l’ont bonifié, et comme un bon vin, le couteau suisse s’améliore avec les années. D’ailleurs, Tony Martyr la gueule. Condamné par la 4ème place de son sprinteur, le panzerwagen se contentera d’être vert de rage en voyant le jaune fuir ses épaules sous l’orage de Zélande. 

Mais bonne nouvelle pour les revanchards, demain sera le jour d’Huy pour oublier hier, alors ne faites pas le mur, gardez-en dans la musette. Bonne nuit !



samedi 4 juillet 2015

Étape 1 : Juan de Nice sur sa vague

Il est 14h et la rampe Festina réglée comme une pendule balance Daniel Teklehaimanot, accompagné de son nom incommensurablement chiant, dans le grand bain de la foule d’Utrecht. Premier africain noir à tenter de tâter le jaune, il rentre dans son effort et dans l’Histoire du Tour. Voilà pour la postérité, après l’année dernière et le chinois Ji Cheng « tueur d’échappée », le Tour vient d’achever sa mondialisation. La grande boucle est bouclée.

Pour la grand-messe du vélo, Adam et Dave sont aux commentaires de la genèse de ce cru 2015. Dialogue, monologue, prologue. Comme à son habitude, il rame Adam, il pédale dans la semoule. Et au jardin d’Eden, pas de hasard : Nicolas Geay, à vol d’oiseau, relève le niveau.

Les affaires reprennent. On soupçonne Lars Boom d’avoir touché au fruit interdit, cependant on ne le bannit pas car « in Vino veritas » nous explique Vinokourov. Qu’à cela ne tienne, mauvais esprit, sors de ce cortisone ! Badaboom : un Lars, et ça repart. 

La course poursuit son bonhomme de chemin de croix. Pinot, de Haute-Saône mais pas des Charentes, signe un beau chrono « cocorico », digne d’un favori. On a déjà envie de lui enlever son « P » pour que ça fasse Hinault, trente ans de disette plus tard. On s'emballe. Patience, son Tour viendra. 
Juan de Nice, très en cannes, avait déjà fait sa promenade des australiens. Meilleur temps pour le wallaby : c’est la fête du slip kangourou, tout le monde s’en émeut. 
Il ne sera plus battu, malgré la foule qui chante « Je t’aime » à Cancel-Lara Fabian, malgré le tonique Martin, malgré un Tom au four et Dumoulin et malgré ce beau plateau de compas qui roulent furieusement des mécaniques.

Au terme de ce prologue, le premier maillot jaune du Tour de France 2015 est australien. Et il le portera demain matin tout haut aux Pays-Bas. 

Il a le smile Rohan

Quelques conseils pour rester frais

Bien chères lectrices, bien chers lecteurs, qui êtes de plus en plus nombreux sur ce blog malgré les fortes chaleurs (faut-il en déduire que vous êtes jeunes ?), permettez-moi de vous briefer quant à l’étymologie du mot « canicule ». Nonobstant l’étendue de toute votre science, je doute que vous sachiez que « canicule » en latin signifie « petite chienne » et que « petite chienne » désigne l’étoile Sirius et que Sirius se couche et se lève en même temps que le Soleil du 24 juillet au 24 août, ce qui poussa nos Anciens à croire que les grandes chaleurs étaient dues à l’apparition de cette étoile, non pas de mer, ni de David, mais mystérieuse car à chaque apparition, tin tin ! la voilà. Maintenant que vous êtes savants, je vous vois venir avec vos gros jabots, vous allez objecter que « grosse chienne » eût été plus seyant pour parler chaleurs. Je suis bien d’accord.

Quand il fait aussi chaaaauuud cacao, si tu me donnes tes noix de coco, moi je te donne mes ananas, et puis aussi quelques conseils pour jouir à fond de ces rares instants de canicule, car mine de rien c’est que tous les douze ans :
Débranchez vos téléphones mobiles, éteignez vos téléphones fixes, et vice versa, faites-vous injoignables ! Car rien de pire, sérieux ! que tous ces bips et autres petites musiques électroniques qui viennent interrompre les acteurs au milieu du deuxième acte !
En revanche, s’il est un équipement à allumer, après votre femme bien entendu, c’est votre télé ! Allumez-moi tous ces écrans solaires ! Et calez-vous, ma foi, devant le Tour de France qui comme son nom l’indique, part des Pays-Bas cette année ! Mes ami(e)s, savez-vous bien votre bonheur de ne pas faire partie de cette foule bariolée de Lance-Jaja-Merckx partie pour en chier toutes ses tripes un mois durant ? Réjouissez-vous ! Et priez Dieu de n’avoir un jour à vous enrôler dans le peloton. Exécution.
Tout en vous délectant de cette étape de 13,8 km que moi-même je torche en vingt minutes, profitez de votre gourde, mais ne buvez pas ! Ne buvez pas ! De grâce, ne buvez pas ! L’eau surtout est très vivement déconseillée, pour des raisons évidentes d’économie ; il serait tout bonnement irresponsable d’entamer les ressources quand le pire est à venir. Préférez donc à l’heure qu’il est les sodas et autres boissons sucrées ! Chaud, chaud, chaud, chaud cola !
Vous voyez bien qu’en suivant ces conseils à visière, vous pratiquerez une activité physique de canapé au son des vuvuzelas des fans de vélocipède ! Votre dose hebdomadaire de sport délayée dans le plaisir de la gourde et la joie du bidon ! Chapeau ! Encore une fois, nul besoin d’eau. Votre corps en contient déjà 60%. Inutile de vous faire plus lourd que vous n’êtes. Les kilos en trop pèsent tant par les temps qui courent. Par contre, n’hésitez pas à prier votre partenaire de procéder sur vous à l’onction de la sainte crème de Foissiat, la meilleure ici-bas contre les coups de chaud. Oui, la crème fraîche.
Ouvrez grand vos fenêtres, vos stores, vos rideaux, vos volets ! Que la chambre-aère ! Et que les voisins en profitent ! Comme le préconisait Julien d’une voix très Cl-Hair : let the sunshine in !
Et puis merde, coupez la clim, vous pourriez prendre froid, ce serait ridicule.
Allez, brasser de l’air, c’est ma façon à moi de vous rafraîchir !