vendredi 29 mai 2015

Gare au Roland !

Roland Garros, ou bien RG comme le surnomment Tintin et Milou, est un tournoi de tennis remporté par Chang en 1989 (on a bien fini par le retrouver ce con, au fin fond du Tibet au volant d'une Lotus bleue). 
Ce même tournoi du grand Chelem, plus grand que le Meaulnes et le Manitou paraît-il, se targue de se jouer sur Terre, sous le soleil et la tête dans les étoiles. Et pas n'importe quelle Terre, messieurs-dames : la terre battue. 
D'ocre et de poussière, de rouille et de bosses. Terrain capricieux en constant mouvement, surface lente qui se moque du synthétique figé de l'US Open. Terrain minet où se recoiffent les Kuerten, où les Nadal ajustent leur bandeau, où les glissades laissent des traces de semelles, Nike sa race et Adidas sur mon bidet. Surface terreuse et imprévisible où André s'Agassi, où Jo-Wilfried tomba, où Gilles franchit six monts, où Juan Carlos tenta de faire héros, où Steffy graffe sur les murs, où Martina Hinglisse, où Pete s'empresse, où Pete s'embrasse, où Pete s'embrase, où Marat s'affine. Cette belle terre teintée du sang des adversaires de Rafa, le bras fort, le Armstrong du tennis. Ah, ce parfum de Roland, ces relents de parfait ! C'est d'la balle ! À un point tel que des petits robots indéboulonnables du fond de court, aimantés à la baballe jaune et esclaves dociles des joueurs, sont programmés pour ramasser les erreurs de ces derniers. 

La Porte d'Auteuil floquée BNP Paribas accueille dans ses tribunes le haut Paris. GDF les fait Suez alors on leur donne des ombrelles et des chapeaux. Au premier rang, on parque des princes. Roland c'est Rolex en bas et Tour de France profonde en haut des tribunes. C'est un festival de cannes et de jeux de jambes sur le tapis rouge du court Philippe Chatrier. Roland, c'est un étonnant mélange des gens et des genres. C'est une lutte du jour contre la nuit, comme un cinquième set à 21h. 

Ce qu'on aime encore chez Roland, c'est sa capacité à fédérer autour de Roger, à rassembler des millions sur une quinzaine, à faire battre des coeurs en choeur quand le sain Rafael écoeure encore la concurrence : Andy l'écossais Murray d'Hadrien, Novak le serbe un peu marteau et faucille, Gaël mon fils à retordre… 

Oui, définitivement, cette année comme beaucoup d'autres avant et comme beaucoup d'autres à venir, nous serons là pour voir Nadal, le géant au pied d'agile, remettre son titre en jeu, set et match.

Michael Chang, vainqueur en 1989

dimanche 17 mai 2015

Cannes, l'enfer du Sud

Arenberg, l’enfer du Nord, a ses pavés. Cannes, l’enfer du Sud, a ses briques. Événement sportif phare s’il en est, rien à envier au Six Nations ou au Tour de France, le Festival de Cannes-y-vaut bien la peine qu’on y jette un peu de lumière. Car à Cannes, messieurs dames, petits champions et grandes championnes de ce monde viennent de toutes parts redoubler d’efforts dans des conditions climatiques périlleuses, soumettre leur carcasse de rouille et d’os à rude épreuve, marquer leur territoire, impressionner l’adversaire. C’est un effort physique démesuré, une course effrénée où même les seins tentent de s’échapper. Faut voir ça ! C’est l’ultime répétition avant Roland. Malheur aux vaincus qui resteront sur la paillette.

L’épreuve, surhumaine, consiste à gravir quinze marches. Tous les coups sont permis. Le tapis rouge absorbe le sang tout en en masquant les traces aux âmes les plus sensibles. Quand Lambert-il-sonne le coup de clairon synonyme de départ, c’est une orgie de tissu qui s’agite dans les starting-blocks. C’est à qui s’ébranlera le moins mal. Très vite, Christopher, le maître, aux avant-postes, creuse un écart significatif de trois marches. Le troupeau des poursuivants, emmené par del Toro, crache tous les poumons qu’il peut pour tenter de revenir sur l’homme de tête. Les frères Couenne, trop gras pour suivre la cadence endiablée, lâchent prise. Bien que le parcours soit rectiligne, certains des gros tas-pi-rouges en plus, à force d’en baver, parviennent à se perdre, plus très lucides qu’ils sont, là par exemple y a Miranda qu’erre d’une barrière à l’autre. Richard, bouche bée-rit. Sean peine.

« Arnaud, dépêche-hein ! » gueule Clément en direction de la horde des retardataires. À mi-parcours, les organismes frisent le coma. Nathalie bâille. Dans le peloton, visiblement sûre de ses chances, Lupita-chatte avec Woody, hors d’haleine. Benjamin quant à lui se plaint d’ampoules à ses mille-pieds ; du coup, Natalie le porte, son homme, Natalie Portman. C’est le contraire chez les Palmade, c’est Pierre qui porte Rossy. Au stand de ravitaillement, hystérique, il se nourrit Léonard, d'eau, de câpres, rit haut.

Mais que c'est-doux de toucher au but ! Contre toute attente, Julianne franchit la ligne d’arrivée la première, à l’article de la Moore. Sharon, stone, est contrôlée positive à la coke. Pierre aussi, mais Pierre niait.

On dit que ce qui motive ces mille-vaches à entreprendre une transhumance si douloureuse pour leurs gros sabots, c’est ce plateau télé tout en haut où elles pourront bien nous les brouter. C'est sûr qu’une fois en haut la vie est belle ! Antoine déconne, citant tour à tour Saint Augustin et Saint Stéphane dont la philosophie du Carpet Diem est désormais sur le tapis pour les siècles des siècles. Pour information, le mythe de la caverne, c’est de lui aussi… le mythe De Groodt !

vendredi 8 mai 2015

Surfer la mer, frôler la mort

C'était au retour d'un week-end à l'océan, là où l'eau c'est encore plus grand que la mer. L'Atlantique, pas pacifique pour un sou marin, avait fait pas mal de vagues, entre frasques et bourrasques gorgées d'embruns et d'iode, plus salé que Rabat. Ça tombait bien puisque je m'y étais rendu pour faire du surf, sorte de planche à roulettes sans roulettes mais sur rouleau. De la planche à rouleau, quoi. C'est quelque chose de très christique, finalement, que de marcher sur l'eau et de multiplier les rencontres avec les poissons en prenant des pains, ressuscitant des morts en sortant la tête des abysses désordonnées pour transformer l'eau en vain combat. 
Ça a de la force une vague, croyez moi, ça cogne plus fort que les manies de Pacquiao. 
En réalité, l'océan, c'est ni plus ni moins que la planète Terre qui te gifle et te ramène à ta condition de petit pion faible et infime dans l'immensité de la grosse boule qui flotte dans l'infini noir et étoilé.   
Qu'à cela ne tienne, je ne vous conterai pas mes vagues exploits surfiques, car vous n'oseriez les croire. Ce qui nous importe ici, c'est le retour. Sur l'autoroute rapide et tueuse, sur la terrible highway to hell où l'homme a AC/décédé. Là où j'ai littéralement frôlé la mort.

La pluie, les projections, la monotonie d'un trajet plus droit qu'un i au garde-à-vous. La voie de gauche, la grande vitesse, le cerveau en semi-coma, juste assez éveillé pour survivre. 107.7, autoroute info, la voix imbuvable de France Gall. Suivre le cortège de phares rouges, clignoter, doubler, se rabattre, continuer pendant six heures et répéter la manœuvre jusqu'à bon port. Le bruit des pneus qui embrassent le macadam, la ligne droite toujours, les lignes blanches qui dansent, la voie de gauche encore. Et ces phares étonnamment jaunes au loin. Des phares jaunes ? En face ? Mais ne sont-ce pas des phares rouges que l'on voit depuis le début ? C'est marrant comme ils grossissent vite ces deux grands yeux jaunes. Ils viennent sur nous, on dirait, non ? Allez, il est temps de gueuler. 

"CONTRESENS !"

Le pilote de mon carrosse m'écoute sans réfléchir et balance un immense coup de volant vers la droite. Grande vitesse face à grande vitesse, deux-cent mètres durent moins d'une seconde. Nous frôlons in extremis la voiture et la mort à 130km/h qui à contre-courant ne demandait qu'à nous exploser frontalement dans le capot. Pauvre fou distrait, tu voulais ta mort ou la nôtre ? Arrête-toi vite ducon, avant de tuer.* Je n'ai pas passé un week-end en Vendée pour finir en miettes sous ton inconscience. 

J'étais juste venu surfer.

Spot de surf de BudBud, à Longeville-sur-Mer 

*Après épluchage des faits divers aux alentours des Sables d'Olonne, il semblerait que le décérébré n'ait pas fait de victimes.